mercredi 20 novembre 2013

Cocorico, les pieds dans la merde



Je voudrais seulement dire à tous les lecteurs férus de foot qu'on est très content d'aller au Brésil.

Mais :

           - A-t-on vu la même équipe d'Ukraine qu'au match-aller ? Non

           - A-t-on vu la même équipe de France ? Non plus.

           - Imagine-t-on TF1 perdre des centaines de millions d'€ de retombées publicitaires en l'absence de la France ? Non, bien sûr... (le Titre TF1 a pris en bourse 7% dès le mercredi matin)

          - Enfin, imagine-ton François Hollande -dans la situation d'impopularité totale où il est- s'exposer personnellement et exposer le Pouvoir au ridicule d'une élimination, avec la portée symbolique que cela peut avoir sur les masses ? Pas une seule seconde...

Sa seule présence et les élements de configuration générale du match me suffisent à penser que la partie était tout simplement truquée.

Mais ça n'engage que moi. On y croit !!!

vendredi 1 novembre 2013

Plaidoyer des prédateurs : «Libérez nos fesses !»

paru sur agoravox, lien pour les commentaires



«Dire que les femmes ont le droit de se vendre,
c’est masquer que les hommes ont le droit de les acheter» 
Françoise Héritier

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Voici un sujet clivant, et soporifique : le plaidoyer ultra-individualiste des riches et beaux amateurs de putes, dit «des 343 salauds», en réaction à la proposition de loi de Maude Olivier, député du P.S.  Je n’aime pas les Tartuffes qui diraient «moi, jamais», mais je n’apprécie guère non plus les esclavagistes. 

Qu'y voir d’autre qu’une provocation anti-parlementaire ?
La prostitution est une des horreurs de l'humanité. Mais l’exposition de la santé individuelle par l'utilisation d’hydroxyde d’aluminium introduits dans les vaccins aussi est une horreur. La nocivité des particules du diesel aussi. Le travail des enfants en est une autre, etc. 

Or, est-ce que demain nous allons nous réunir pour réclamer au contraire le droit d’être piqué à l’aluminium et le droit de continuer à rouler en Mercedes si ces deux abominations quotidiennes venaient à être interdites ? Alors, allons-nous pétitionner encore et encore, ou faire adopter des politiques humainement responsables ?

Que dit le texte source : «chacun a le droit de vendre librement ses charmes…» Et c’est là le malentendu, le biais, qui rend toute cette polémique stérile. Les auteurs ne parlent que des prostitué(e)s qu’ils fréquentent, eux. 

Mais voyons, imagine-t-on une seule seconde le fils Bedos, ou Eric Zemmour se pointer à Belleville et faire monter une vieille chinoise dans leur Hummer ? Non, ceux-là «se servent» dans les catégories B des agences de mannequins, recrutent aux palaces, à la sortie du cours Florent, chez les jeunes acteurs (-trices) en mal de contrat et d’avenir. Pas en division Z, pas dans celle de la traite des humains, bien sûr, pas de ça chez nous...

On apprécie au passage la fameuse défiance à l'égard de l'Etat, antienne de la droite poujadiste : pour dire l'Etat se mêle de nos fesses... Il fallait avoir la plume bien acérée pour invoquer leur liberté !

Je suis contre l’envahissement du secteur marchand dans tous les aspects de nos vies, contre la Gestation Pour Autrui, contre l’école payante, contre les cliniques privées, etc. Car, comme ces signataires de mes couilles (pour une fois on peut le dire) j’aime la liberté, justement. Dans l’idéal, je suis contre la drogue, et bien entendu contre la prostitution, forme aggravée d’esclavage, d'aliénation, de dépendance, de déprédation de l'être humain.

Je ne me joins évidemment pas à la liste de ces salauds, parce que je n’en suis pas un. Je suis peut-être un «con» comme le dit Gaël Brustier (qui n’est pas signataire, je vous rassure) je suis même assez narcissique pour me vanter de ce que pense de moi une telle sommité, mais un «salaud», non. Même avec humour. Je ne suis qu’un comédien inconnu, doublé d’un auteur humblement publié et qui n’a jamais écrit sur ce sujet.

Mme Elisabeth Lévy, directrice de «Causeur» , à l’origine de ce texte avec Begbeider en a «marre de la gauche et de ses peine-à-jouir». 

Se dresser contre l'exploitation sexuelle, c'est pour vous Madame, être un peine-à-jouir ?

Eh bien moi, j'ai marre de la droite et de ses prédateurs, des jouissances de cougars libres. Et je n’ai pas cette peine-là, Madame, et pourtant je suis de gauche. N'en avez-vous jamais croisés ?

(Mme Lévy devrait se donner la peine de lire le court «Souci des plaisirs» de Michel Onfray, et leurs origines martyrologiques, elle comprendrait sûrement d’où lui vient cette association d’idée en forme de cliché…)

Tout m’incite à penser que ce manifeste est un pur objet de droite. 

Être de droite, c’est s’accommoder si bien avec la réalité la plus affreuse qu’on y prend même sa part. C’est accepter la nature pervertie de l’humanité à la prédation. C’est penser que puisque c’est un gigolo, une pute, c'est qu'ils le méritent, et qu’on va même leur offrir de quoi vivre, comme le créateur d’entreprise «offre» du travail, n’est-ce pas ? Être de droite, c’est croire qu’il y a donc une main invisible des destins, comme il y en a une pour les marchés. Être de droite, c'est s’accommoder surtout avec sa conscience, religion et absolution à l’appui.

Il est étonnant que ce manifeste recense des intellectuels catholiques (ou qui se disent tels). C’est sacrément singulier de tapoter le cigare, sur le dos d’une personne qui travaille, en pensant spiritualité, non ? 


Et ce n’est pas un comédien comme moi qui vais donner une définition restrictive de la prostitution. Parlons de l’esclavage humain à des fins sexuelles, ce qu’on appelait dans les officines pudibondes «le commerce de la chair».

La prostitution recouvre diverses formes, du mariage au souper d’affaires. Ce qui serait une «jeune femme ambitieuse» dans le monde de la haute-finance n’est évidemment pas une «pute» pour Begbeider. Pour moi si. Et même peut-être une grosse. «Tu vas travailler pour moi, mais d'abord tu vas me donner ton corps». Si ce n’est pas de l’esclavage ça… 

D’abord, il faut dire à la décharge des ambitieuses que ce sont souvent des porcs, pardon, des hommes qui tiennent les ficelles de la promotion sur leurs canapés et défont leur soutien-gorges. Est-ce là spécifique aux messieurs ? Je ne sais... Je sais seulement que j'aurais peur si je me trouvais sur le même canapé qu’Angela Merkel…

Sans parler des actrices de cinéma, que Begbeider-frère et Bedos-fils connaissent bien. Là, les sommes en jeu n'ont aucune commune mesure avec ce que va gagner la pute du coin de la rue au cours de sa misérable vie ! 

Et puisque le fils de Guy Bedos est signataire de cet appel au droit individuel à-jouir-sans-entrave-sans-penser-à-l’autre, souvenons-nous qu'il lançait à une jeune et jolie fille sur une plateau de télé, il n’ y a pas si longtemps, qu’elle avait envie «de se la ramener, parce que elle a envie de faire de la télé, comme toutes les putes». Si c’est lui qui le dit... mais c’était pour rire, n’est-ce pas ? 


Nous avons en commun l’écrivain Guillaume Chérel et moi d’avoir tous deux une fille du même âge, et c’est justement en père qu’il s’exprime, ce dont je le félicite. Quoique, bien de bons pères de filles sont allés «voir» des filles d’autres pères. 

Il a en commun avec lesdits signataires d’aimer la littérature. N’empêche, ça n’en fait pas un salaud ! Il a même la franchise de dire sur Rue89 qu’il y est allé, et même qu’il y est retourné.

Mais pour éviter de parler de ce que je ne connais pas, je vais, à l’instar de mon ami Guillaume Chérel, parler de ce que je connais même si tout le monde s’en fout !

Donc, au fait : moi aussi, je suis allé «voir» une pute*. On dit bien «voir» un psychologue... et une fois seulement. Et pas «pour voir» comme le dit mon voisin. Mais, comme lui, en victime des représentations machistes qui émaillent la littérature américaine et ses avatars filmiques. Bien qu’il fît assez chaud là aussi, mais c’est pas une excuse.

Non, c’est moins gai. J’ai traversé, comme beaucoup de mes coreligionnaires en paternité divorcée, une Manche-ouest très démontée où la tendresse et la sexualité n’étaient plus qu’un lointain souvenir. J’avais envie de retrouver les sensations euphorisantes que donnent le sexe. Je n’ai pas trouvé d’autres moyens que de payer un service, plutôt que d’embobiner une pauvre fille et promettre la Gascogne à qui s’ennuyait à la caisse d'un supermarché. De plus, n'ayant jamais touché à aucune drogue (sauf les légales) je n’ai pas non plus l’idée d’un bonheur physique plus transcendant que celui procuré par le sexe. C’est mon héroïne, et j’en cherchais justement une pour y accéder.

Celle qui m’a piqué se tenait rue St Denis à Paris. C'était une jeune femme ni super épanouie, ni total défoncée. Je ne sais pas qui était derrière elle. Elle avait un joli corps, était mignonne, mais sans plus. Elle me disait que son rêve était d’avoir une maison en Corse et qu’elle avait vu passer pas mal d’acteurs de télé dans son salon, me demandant ce qu’on avait tous à aller aux putes… Elle s’est déshabillée. Moi aussi. Un peu honteux soudain, alors qu'à la piscine, à l'époque, je n’avais pas ce problème de pudeur. 

Et que croyez-vous qu’il s'est passé ? Eh bien, rien. Nada. Nothing. Et je me suis rarement senti aussi mal à l'aise.

C’est dans ce rapport de domination par l’argent que m’est apparue l’horreur de la situation. Je me suis vu dans un rapport de services tarifés mais sexuels (ou de sévice tarifé, au choix). Et je me suis dit, Peut-on exposer son intimité à un service marchand sans avoir l’impression de vivre en enfer ? Contre de la monnaie en plus ? 

Dès lors, le problème a été réglé puisque mes organes ne répondait plus. Peut-être parce que le rapprochement avec ma condition professionnelle s’est fait à ce moment-là dans mon esprit. Cela a peut-être à voir avec un phénomène profondément humain qui s’appelle la compassion. Je ne voulais pas que la partie la plus intime de mon corps, ma chair la plus fine, serve à ça. Avant de le vivre, je ne le savais pas. Je remercie au moins cette demoiselle de m’avoir ouvert les yeux, à son corps défendant...

Manifestement, cette fille méritait mieux. Comme tout autre personne de cette étrange condition. D’ailleurs, moi aussi je mérite mieux ; et s’il fallait parler métier, ma condition qui est de me vendre en permanence ressemble quelquefois à la sienne. Je suis prêt à soutenir qu’il y a bien des parallèles à faire.


Je ne jette pas la pierre à ceux qui peuvent dresser l’étendard, fièrement ou non, dans de pareilles conditions et qui se disent être 343 ; mais pour moi si c’est pour hisser le drapeau avec honte, autant le laisser en berne, mon cher Guillaume. Ce sont là de vrais salauds, puisqu’en reprenant le mot de Charlie Hebdo concernant les femmes des années 70, il n’assument pas vraiment de l'être ! 

Face à un discours féministe radical, des ligues de vertus hyper-médiatisées, je veux dire à ces gardiennes ultimes de l’extrémité que je ne me reconnais pas dans leur schéma brutal. Ou alors, je ne suis pas vraiment un homme selon cette grille de lecture de ce qu’est un homme. 

Alors, je suis peut-être un «homme nouveau» comme elles disent ; et nous ne sommes en tout cas pas seulement 343, on est des millions… Je suis donc de ceux qui s’occupent de leurs gosses, et quittent une réunion parce que leur femme est seule à la maison ; ça ne lui est jamais apparu, à elle ; mais ça devrait réjouir les ligues féministes. 

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Lire l'article de Morgane Merteuil du Strass :  http://www.lexpress.fr/actualite/manifeste-des-343-salauds-l-abjection-n-a-plus-de-limites_1295514.html



 Laissez au moins les gens finir leur phrase, Mademoiselle Ben Omar, avant de lever le poing, puisque vous avez gagné.