vendredi 11 mai 2012

Hénin-Baumont, d'un Front l'autre

Jean-Luc Mélenchon annonce sa candidature dans le "fief" tristement célèbre de Hénin-Beaumont, Pas-de-Calais (62).


Hénin-Beaumont n'est pas une "terre" d'extrême-droite. Pas une possession, pas une propriété. C'est un espace démocratique aussi ouvert que peuvent l'être toutes les circonscriptions de France. 

L’élection d’un député Front de Gauche en lieu et place de Marine Le Pen pour cette circonscription, ce département où j'ai des racines familiales, entachés depuis une dizaine d’années par la présence du Front National, serait hautement symbolique

  • Ce serait la démonstration par l'exemple que les habitants des bassins industriels désaffectés n'ont pas que l'extrême-droite comme recours démocratique

  • que le vote ouvrier n'est pas acquis au F.N

  • Ce serait la preuve que sans des accords tacites pour que le FN s'implante, il ne  pourrait pas s'implanter.

Car c'est d'une tout autre offre politique dont les gens ont besoin. Encore faut-il, eh oui messieurs, œuvrer à un lent et patient travail d'éducation populaire. Et si l'on croit que TF1 va assumer sa référence éducative en matière de citoyenneté, notre pays finira très mal.

Le bassin industriel du Pas-de-Calais et du nord de la France, il est vrai a été déserté par le Parti des notables Socialistes, ou le Parti Seul-Réaliste -on ne sait plus comment l'appeler. Dès les années 80, de Amiens jusqu’à Metz en passant par Dunkerque, nous ne vîmes plus un élu, ni un militant socialiste parcourir les rues de nos quartiers ouvriers, et encore moins le porte-à-porte que même le Parti communiste, diplodocus amiénois, avait abandonné. 

Petit à petit, de quartiers de travailleurs, il devinrent quartiers de chômeurs, et le bulletin de vote de rouge devint bleu marine. On a beau dire qu'il reste minoritaire, le dénier, c'est ne pas reconnaître que 6% d'ouvriers qui votent à l'extrême-droite, c'est encore trop.

Ce serait un symbole d’espoir pour tous les classes populaires de ces bassins qui finissent par avoir un complexe généré par le FN. Sans honte ce parti s’approprie les thématiques ouvrières sans en défendre un seul aspect progressiste, comme cette pseudo- augmentation de salaire de 200 €, adossée en fait sur les cotisations sociales elle-mêmes ! Un rêve d’extrême droite, dure aux salariat et douce au patronat. 


Et ce sera aussi une première pierre dans l'entreprise de démystification du F.N que le Front de Gauche s'est assignée.



Cependant, M. Mélenchon eut une explication sur France-Inter que j'ai trouvé personnellement juste du point de vue historique puisque c'est un bassin ouvrier depuis deux siècles, mais de nature à brouiller la clarté du positionnement du Front de Gauche (écouter le son en début de journal)

Il a parlé de "l'état de délabrement de la Gauche socialiste" à propos des candidats du P.S et leurs bisbilles.

la rose a rétréci au lavage



Mais alors, se dit l'électeur de Jean-Luc Mélenchon, qui sommes-nous ? Socialistes ou communistes ? Ou un autre genre, qui reste à définir, une formule qui sortira un jour de la botte à Jean-Luc et qui fera école ?


Peut-être néo-socialistes pour s'opposer au néo-libéralisme ?
Allez, on fait un sondage.


Les termes de Jean-Luc Mélenchon sont peut-être choisis de façon à ne pas mêler la gauche communiste à ces abandons des terres ouvrières qui ont accompagné la tertiarisation de la société française. C’est ménager les susceptibilités internes et n’aider pas à la clarté du propos. 

Divers, encartés ou pas, électeurs et citoyens anonymes, ont-ils besoin de s’accrocher à une étiquette politique pour exprimer leur colère, sûrement pas. Mais pour savoir comment on la structure, en faire le portrait, se situer, comment on fait... 
Militants, c'est dans l'une des huit composantes du Front de Gauche. Et là se pose à eux un problème d'identification idéologique.




Le programme "L'Humain d'abord" défendu au long de la campagne présidentielle ne prônant en rien une collectivisation des moyens de production, on ne peut pas dire qu'il soit communiste. Sinon que serait Lutte Ouvrière ? 


Il y a parmi le FdG une composante qui se dit alternative au communisme d’état, la F.A.S.E, qui a une ligne alter-mondialiste, un socialisme qui vise clairement à l'auto-gestion. La “Gauche Unitaire” vient de l’ex-LCR. Un collège de cadres du NPA vient de rejoindre Mélenchon au cours de la précédente campagne. “République et Socialisme” sont les chevènementistes de gauche, jauressiens issus du CERES au PS, puis du M.R.C. Le PG lui, est une composante radicalement socialiste et écologique issu du Parti Socialiste de 1971 (du Congrès d’Epinay jusqu’au tournant libéral de 1983 à la démission de Pierre Mauroy).


Bannière FdG élections régionales de 2012
Depuis cette année là, le PS n’ a eu de cesse de s’enfermer dans la volonté de coller aux pré-requis de la construction européenne. Au fur et à mesure des différents traités, Acte unique européen, Maastricht, Barcelone, Nice, Lisbonne, il pâlit et, de rose, il est aujourd’hui presque blanc. Celle-ci jouant sur la contrainte concurrentielle entre systèmes sociaux des pays d’Europe, le PS fait le lit de ce capitalisme moderne, anti-salarial, dont la principale caractéristique de son accomplissement est le surendettement des nations. Nous y sommes.

C’est donc grâce ou plutôt à cause de l’allégeance trentenaire des Partis dits Socialistes d'Europe que nous sommes aujourd’hui si exposés aux dommages collatéraux de l’économie financiarisée, le primat des banques privées sur nos politiques publiques.
Et c’est grâce à cette tension si forte en son sein, avec  des courants divers au PS dont je fais grâce ici, que l’un de ces courants -P.R.S, emmenée pr Marc Dolez Jean-Luc Mélenchon et Jacques Généreux-  a accouché du Parti de Gauche. Quelle histoire !
Alors, si le P.S est identifié par Jean-Luc Mélenchon lui-même à la "gauche socialiste" que nous reste-t-il ? 

Je croyais pour ma part que les socialistes, face au PS, c'était nous ; que les écologistes c'était nous, face à cet ersatz de Parti libéral rien moins qu’européiste (Europe écologie), que les républicains face à ce M.R.C qui n'arrête pas de délivrer ses essences de sapin, c'était nous ; et qu'au pinceau de cette composition se dégageait une couleur socialiste, précisément.




J'avais répondu à France 2 le soir du premier tour (même si toutes mes interventions ont été coupées :D) que, si le Front de Gauche faisait plus de 10% alors il y aurait désormais en France une gauche non-socialiste vainqueur au premier tour, et une gauche socialiste, nous, arbitre du second.
J’aimerais que l’usage des termes soit clarifié au moins au sein du Parti de Gauche sinon du Front de Gauche tout entier. 

Que l’on ne dise plus “socialiste” pour désigner les membres ou les dirigeants serait déjà un progrès. On peut dire P.S, ou les sociaux-démocrates du P.S... et pour éviter de dire Parti Socialiste, pour rire on peut dire comme mon ami Maxime Laysné “Le Parti seul-réaliste”. Frédéric Lordon lui a pris le parti de consacrer “le Parti dit socialiste”, ce qui a ma préférence qui est léger dans la forme tout en étant lourd de sous- entendu..
A n’y prendre garde, par cette répétition langagière inappropriée de “socialiste” nous renforcerions, voire nous validerions l’impostureCe serait même un comble que nous en soyons les colporteurs.
Je n’insulte pas les électeurs du PS, qui sont sincères dans leur démarche, ou certains militants qui sont sincèrement désolés de l’orientation contemporaine de la direction du P.S. Je ne désigne pas du doigt le parti dans son entier. Je ne lui reproche même pas d’être ce qu’il est, puisqu’à présent en plus d'offrir un point d'appui à notre critique, un débouché politique pour qui se réclame du socialisme commence à s'entrevoir. 

Non. Qu’il porte réellement le nom de ses valeurs, et les idées seront plus claires pour tout le monde, voilà ce que je lui demande. 
Le P.S pourrait très bien comme il l'a fait lors des votes au Parlement européen s’allier au Modem, au Nouveau-Centre, aux Gaullistes sociaux dans une alliance social-démocrate, par exemple. Il y a fort à parier que ces bonnes gens s’ingénient alors à appeler le Front de Gauche par son nom, ou à la qualifier de Gauche socialiste. 

Ce serait un service réciproque à se rendre et à rendre aux citoyens.


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La campagne menée par l’équipe du Front de Gauche détricotant les mesures annoncées du FN est visible ci-dessous dans une vidéo enregistrée lors de la venue de Alexis Corbières et Laurent Mafféis à Hénin-Baumont en mars 2012.



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